Jeudi 16 mai 2019, Louise Koubi, étudiante à l’École de Condé, interviendra lors d’une conférence organisée à l’École de Condé Patrimoine sur la restauration d’un livre de poncifs japonais de la maison Dognin. Rencontre.
J’ai travaillé à la restauration d’un recueil de poncifs japonais d’une rare beauté, qui est issu du fonds documentaire de la Maison de dentelles Dognin.
La maison Dognin est une entreprise qui a élaboré le métier à dentelle de Lyon dans les années 1840-1860. L’entreprise a fait appel à moi car elle souhaitait restaurer ce livre pour qu’il puisse de nouveau être consulté. En effet, ses motifs pourraient servir à inspirer les créatifs de la maison Dognin pour de nouveaux modèles.
Les pochoirs présentés dans cet album sont des poncifs japonais, appelés katagami, qui sont datés de l’âge d’or du katagami, la période Meiji (1868-1912).
Les katagami étaient des objets qui étaient faits pour être jetés. Quand on s’en servait, ils s’usaient : le motif pouvait se déchirer, il pouvait se déformer et donc ne plus être utilisable. C’est une fois l’objet usé qu’il pouvait être revendu à des collectionneurs, ce qui explique que les katagami qui arrivaient en Occident étaient souvent déjà abîmés : déformés, déchirés, lacunaires et fragilisés par l’utilisation et par le temps.
Dans l’album que j’ai restauré, il y a soixante-treize katagami. Certains présentaient de grosses lacunes, la plupart avaient une partie du motif qui était repliée. Surtout, comme ces katagami étaient présentés sous forme d’album, il y avait beaucoup d’altérations qui découlaient de ce montage. Le restaurer en conservant tous les éléments d’origine était un défi technique.
Je suis actuellement étudiante en deuxième année de Mastère Conservation- Restauration du Patrimoine, spécialité arts graphiques. A terme, j’aimerais travailler dans un atelier de Restauration, idéalement un atelier pluridisciplinaire avec les différentes spécialités de la Restauration qui se côtoieraient pour travailler ensemble sur certains projets.
Les poncifs japonais (ou katagami) sont des pochoirs qui ont été fabriqués au Japon à peu près depuis le XIIème siècle. Ils servaient à imprimer des motifs d’abord sur des pièces de cuir, puis ensuite sur des tissus, en particulier pour la réalisation des kimonos.
Ces pochoirs étaient fabriqués avec du papier fait à partir de feuilles de mûrier japonais, l’arbre du ver à soie, qui était ensuite fermenté dans du jus de kakishibu. Ce jus de kaki permettait de rendre le papier solide et imperméable. Ensuite, les artisans-graveurs découpaient les motifs à la main dans ces feuilles de papier pour créer des pochoirs. Ces pochoirs étaient pour finir consolidés avec des fils de soie.
Pour s’en servir, on appliquait le pochoir sur le tissu. A travers le pochoir on ne passait pas de la couleur mais une pâte de riz qui permettait de créer les motifs en réserve sur le textile.
Les katagami ont inspiré des artistes autant dans les Beaux-Arts que les créateurs en arts appliqués : on retrouve leur influence dans le mobilier, les bijoux, aussi dans toutes sortes de créations textiles, que ce soit du textile d’ameublement ou du textile d’habillement. Comme ils étaient produits en grande quantité, et qu’on s’en débarrassait au Japon, ils sont arrivés en masse et pour une somme modique en Occident. Cela explique qu’ils aient beaucoup influencé la création occidentale sur cette période.
Illustration : La Japonaise, Madame Monet en costume japonais, Claude Monet (1875)
Conférence «Conservation-restauration d’un recueil de Katagami (livre de poncifs japonais du début du XXe siècle), appartenant à la maison Dognin» par Louise Koubi
École de Condé Patrimoine
58 Boulevard Garibaldi, 75015 Paris
Entrée libre sur inscription : contactez contact.patrimoine@ecoles-conde.com